Semences hybrides, semences paysannes : quelle différence ?

Savez-vous pourquoi les graines des jardineries sont presque toutes hybrides ? Qu’est ce qu’une semence dite paysanne ?
Julie et Julia répondent à nos questions et nous expliquent pourquoi certain.e.s s’opposent au système actuel de vente de semences !

* La semence est le terme utilisé pour les graines destinées au semis. Les sélectionneurs sont à l’origine des créations variétales puis les semenciers sont les entreprises ou personnes qui produisent des semences.*

Depuis le néolithique, les semences paysannes sont utilisées pour nourrir les hommes. Ces dernières ont trois particularités : une pollinisation libre, des variétés gustatives et une diversité génétique.
Cependant, après la Première Guerre mondiale, les pouvoirs publics se donnent pour objectif d’assurer la sécurité alimentaire, garantir la qualité des semences achetées et accroître les rendements. Le GEVES (Groupe d’Etude et de Contrôle des Variétés et des Semences) crée alors le catalogue officiel des espèces et variétés végétales qui répertorie les semences autorisées à la vente et à la culture. Chaque semence inscrite doit répondre à des conditions techniques de distinction, d’homogénéité et de stabilité mais aussi apporter un progrès agronomique et/ou technologique et/ou environnemental. Les semences paysannes qui sont diversifiées et variables sont alors exclues de ce catalogue !

C’est dans les années 50 que les premières variétés hybrides sont développées en France. Une variété hybride F1 (première génération) est obtenue par le croisement de deux variétés avec des caractères intéressants. Les sélectionneurs cherchent à associer des caractères tels que le rendement et la précocité (c’est-à-dire l’aptitude à pousser rapidement) ou encore la qualité gustative et la résistance aux maladies.

Ces créations variétales demandent plusieurs années de recherche, ce qui engendre un coût financier pour les sélectionneurs. Le brevet sur une variété végétale ou une race animale n’étant pas autorisé en Europe, les sélectionneurs peuvent compter sur le Certificat d’Obtention Végétal (COV) pour protéger leur activité. L’obtenteur d’une variété protégée par un COV a le droit d’exiger le paiement de royalties sur les semences reproduites à la ferme à partir de sa variété. De plus, pour la majorité des espèces, la multiplication à la ferme est interdite et si l’agriculteur choisit de re-semer les graines hybrides récoltées alors les rendements seraient médiocres. Il est donc poussé à retourner acheter les semences hybrides pour s’assurer d’un bon rendement et devient un client captif du marchand de semences. – Ainsi ce système peut se rapprocher de l’obsolescence programmée des appareils ménagers, qui contraint les consommateurs à renouveler leur électroménager !  Actuellement 50% de la production des semences mondiales est contrôlée par trois multinationales : Syngenta, Monsanto et Dupont-Pioneer. 

Les agricult.eur.rice.s n’acceptent pas tous et toutes de se plier aux règles imposées par ces grands semenciers et une opposition se dessine un peu partout. Une résistance se développe pour ressusciter d’anciennes variétés de légumes et de céréales, pour assouplir les règles de commercialisation des légumes oubliés et pour le droit de troquer ses semences. Toutes ces actions se basent sur une idée commune : les graines sont des biens communs et personne ne peut être propriétaire de variétés entières !
Semences Paysannes a créé un réseau de Maisons des Semences Paysannes afin de protéger et de reproduire des semences anciennes. Le réseau se base sur le fait que 90% des paysans dans le monde utilisent leurs semences paysannes et souhaitent que le monde occidental se rapproche de ce modèle.
L’association Kokopelli, elle, revendique l’appartenance des semences au domaine public : « Les semences, comme n’importe quel être vivant, n’appartiennent à personne et à tout le monde en même temps, il ne peut y avoir de droit de propriété ! ». Celle-ci commercialise depuis presque vingt ans des semences paysannes pour les jardiniers sans se soucier de la réglementation.

L’Union Européenne a voté une nouvelle législation autorisant les producteurs en agriculture biologique à vendre des semences paysannes à partir de 2021. C’est l’opportunité de favoriser notre biodiversité et redonner vie aux milliers de variétés anciennes qui existent !

Maintenant que vous en savez un peu plus sur les semences, et si vous avez chez vous de quoi jardiner, profitez du printemps pour faire vos semis !

Julia Maffre & Julie Delaby

 

Pour approfondir la question, vous pouvez consulter nos sources ou regarder cette vidéo, mise en ligne par les organisateurs de l’événement national des 48h de l’agriculture urbaine !

La page de l’évènement des 48h à Marseille : ici !

Sources : 

https://blog.kokopelli-semences.fr/

https://www.gnis-pedagogie.org/

https://www.infogm.org/

https://www.geves.fr/

https://www.semencespaysannes.org/

https://reporterre.net/

 

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