La recherche-action en cours à la Cité de l’agriculture

La précarité alimentaire atteint un niveau très alarmant en France et il devient plus que nécessaire de défendre l’importance d’une alimentation digne, saine, nutritive et incluant des produits frais pour toutes et pour tous. 

L’agriculture urbaine peut être un outil prometteur pour développer une justice agri-alimentaire. Certaines caractéristiques semblent pouvoir contribuer à s’opposer aux inégalités du système alimentaire. L’agriculture urbaine se déploie sur de faibles surfaces, le plus souvent adaptées à une production nourricière à destination de quartiers environnants. Or à Marseille, les friches agricoles ont tendance à se localiser dans le nord et l’est de la ville, héritiers d’un canal agricole et surtout d’une urbanisation “lâche” où se concentre une grande partie de la précarité socio-économique et alimentaire.

Ainsi, de nombreuses initiatives populaires et nourricières ont toujours accompagné les périodes de crise économique et sociale : étalement de la ville sur les terres agricoles, installations de nouveaux arrivants de campagne plus ou moins lointaines 1. Pourtant, les produits et lieux de l’agriculture urbaine peinent à s’ouvrir socialement et sont souvent perçus comme “un truc de bobos” 2.

Afin de réfléchir à ce paradoxe, la Cité de l’agriculture, accompagnée d’un ensemble de partenaires, développe une recherche-action ambitieuse visant, dans un premier temps, à comprendre les leviers d’accessibilité de l’agriculture urbaine puis, dans un second temps, à identifier et expérimenter collectivement des pistes d’actions pour que l’agriculture urbaine soit davantage vectrice de justice agri-alimentaire.

Une recherche-action ! mais comment est-ce possible ?

Cette recherche-action est financée par la Fondation de France sur 3 ans et par le financement de l’Union Européenne dans le cadre du projet Cities 20303.

C’est un projet multipartenarial réunissant les expertises du CIRAD, de Action Contre la FAIM et des partenaires opérationnels (Le Talus, Terre d’entraide et de partage et de la Ferme Capri). 

Mais que cherchons-nous à faire ? 

Étude : L’aventure commence avec une étude des représentations et des pratiques des lieux d’agriculture urbaine et du paysage alimentaire autour de ces lieux (12e, 14e, 15e arrondissement de Marseille).

Coopération : Les partenaires du projet se réuniront ensuite lors d’ateliers de travail afin de s’approprier les résultats de l’étude, identifier les actions à mener et leurs conditions de mise en œuvre, notamment au regard des ressources disponibles. 

Expérimentation : De ces discussions vont émerger un certain nombre d’actions à expérimenter : certaines pourront être mutualisées, d’autres seront spécifiques à chaque site. 

Suivi & Évaluation : Enfin, il s’agira de capitaliser de la connaissance sur ces expérimentations en déployant un dispositif de suivi et d’évaluation de ces actions : comment fonctionnent-elles ? contribuent-elles à rendre les biens, produits et services des lieux d’agriculture urbaine plus accessibles ?

Ah d’accord, et vous en êtes où actuellement ?

La première phase du projet a démarré en mars 2023. Le printemps a été consacré à l’observation, à la prise en main des terrains d’étude, à la formalisation d’une méthodologie rigoureuse et au recrutement des participant.es de l’étude. 

Les méthodes déployées explorent des sujets routiniers, habituels, peu souvent conscientisés par les personnes. Cela appelle donc à l’utilisation de méthodes sensibles de sociologie comme du dessin de carte mentale ou encore de la photo-elicitation. 

La phase de recrutement des personnes a été extrêmement difficile et chronophage, les personnes se montrant soit très intéressées, soit méfiant.es mais surtout peu disponibles. Ainsi, nous avons réussi à mobiliser 30 participant.e.s aux différentes étapes de l’enquête qualitative.

Nous sommes actuellement dans la phase d’analyse des résultats visant à prendre du recul sur les données et à avoir un regard transversal sur les 3 terrains, avant de synthétiser le tout dans un rapport d’étude à venir très prochainement.

Et après ? 

Ensuite, il s’agira de partager les résultats de cette étude au plus grand nombre et surtout de discuter des actions, spécifiques ou collectives, à expérimenter pour adresser les enjeux d’accessibilité de chaque lieu. Au programme des prochains mois : rapport d’étude, restitution de l’étude, ateliers de travail et recherche de co-financements pour continuer à explorer ces actions innovantes et ambitieuses, sereinement !


1 Plus d’informations sur : l’histoire des datchas (jardins russes) - C. Robert-Boeuf ; la géohistoire des jardins collectifs marseillais - JN Consalèsles jardins de la Victoire contribuant à l’effort de guerre américain
2 Flaminia Paddeu, « L'agriculture urbaine dans les quartiers défavorisés de la métropole New-Yorkaise: la justice alimentaire à l'épreuve de la justice sociale », VertigO - la revue électronique en sciences de l'environnement [En ligne], Volume 12 Numéro 2 | septembre 2012, mis en ligne le 01 octobre 2012, consulté le 09 octobre 2023. URL : http://journals.openedition.org/vertigo/12686 ; DOI : https://doi.org/10.4000/vertigo.12686
3 Ce projet a reçu un financement du programme de recherche et d’innovation Horizon 2020 de l’Union Européenne. Cities2030 est financé via le programme de recherche européen H2020 (convention de subvention n° 101000640) et vise à favoriser l’émergence d’écosystèmes alimentaires durables à l’échelle locale, en développant des réponses aux enjeux du territoire avec la participation des habitant.e.s. Plus d’informations sur le site web du projet. Le contenu de cet article ne reflète pas l’opinion officielle de l’Union Européenne. La responsabilité des informations et des opinions exprimées ici revient entièrement aux auteurs.

 
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