Depuis le début de la crise du COVID-19 en France, des mesures ont été prises par les autorités interdisant l’ouverture des marchés de plein vent. C’est ainsi que le Marché Retrouvé, qui se tient à la Cité des arts de la rue chaque premier dimanche du mois¹, a dû être suspendu temporairement.
Pour faire face à la situation et prendre du recul, nous avons voulu comprendre comment se réorganisent les autres marchés et initiatives similaires, en particulier celle du grand frère italien de notre Marché Retrouvé, le Mercato Ritrovato. Projet implanté à Bologne depuis 2008, il a inspiré la création du Marché Retrouvé de Marseille. Giorgio Pirazzoli, son responsable, nous raconte de ce qui a été mis en place en Italie.
Comment avez-vous réagi à la crise sanitaire et l’annonce du confinement ?
G.P. – Depuis plus d’un mois, les marchés de plein vents sont interdits en Italie et une semaine avant le début du confinement nous avons décidé de mettre en place un système de livraison à domicile. Parmi les 50 producteurs habituellement présents sur le marché, 30 ont choisi de se joindre au projet. Les 20 restants sont trop éloignés ou n’ont pas assez de produits, et d’autres encore ont cessé la production.
Concrètement, comment vous-êtes vous organisés?
G.P. – Nous avons décidé avec les producteurs de créer une plateforme en ligne pour vendre leur production. Pour cela, nous avons engagé un développeur web, ainsi qu’un photographe pour avoir des images de chaque produit.
Les commandes se font 5 à 6 jours avant le jour habituel du marché, soit du mardi pour le samedi. Les producteurs préparent alors les commandes et se retrouvent le samedi sur le lieu habituel du marché pour composer les paniers. Ils font ensuite appel à un service de livraison pour l’envoi à domicile. Cinq euros supplémentaires sont demandés à chaque commande et sont ensuite reversés au livreur.
Et ça fonctionne bien ? Le public est réceptif ?
G.P. – Oui, cela a demandé beaucoup d’efforts et ce fût loin d’être facile, mais ça fonctionne ! La première fois que nous avons ouvert le site, nous avons reçu 250 commandes en 3h, la deuxième fois 250 en 1h, et maintenant en à peine 1h30, nous recevons environ 350 commandes. Nous devons fermer le site après la réalisation des commandes, on arrive très vite au maximum. Cette gestion demande beaucoup de travail et de coordination entre les partenaires.
Cela annonce-t-il une évolution durable pour le marché?
G.P – Cette expérience est une première pour les producteurs. Nous y avions pensé mais cette crise nous a plongé dans sa réalisation immédiate. Depuis, plusieurs productions agricoles s’y sont mises et ont vu leurs commandes fortement augmenter. Ce site a donc été une réelle solution, même s’il reste encore quelques problèmes à régler.
Par ailleurs, la fréquentation a évolué. Beaucoup de personnes qui commandent aujourd’hui sur la plateforme ne connaissaient pas forcément le Mercato Ritrovato. Il l’ont découvert en cherchant une manière de s’approvisionner en produits frais locaux, ce qui devenait de plus en plus difficile ici.
Comment envisagez-vous l’après-confinement ?
G.P – La fréquentation risque fortement de changer. La clientèle habituelle se compose aussi de personnes plutôt âgées qui ont maintenant peur de tomber malades et qui ne se déplaceront donc sûrement plus avant un bon moment. Mais nous pensons aussi avoir mobilisé de nouvelles personnes. Nous pourrons probablement proposer deux options : le Mercato Ritrovato et la livraison de paniers à domicile pour ceux qui ne peuvent pas se déplacer.
Mais le Mercato Ritrovato c’est surtout un lieu de rencontres, où les gens viennent pour boire un verre et partager un repas en extérieur. Il est donc difficile de se projeter dans l’après confinement, notamment pour les productrices et producteurs qui font de la street-food. Cela dépend aussi beaucoup de l’évolution du volet sanitaire. Mais il va falloir continuer de se réinventer. Cette crise nous met face à des questionnements essentiels, sur le volet écologique aussi.
Le Mercato Ritrovato est bien la preuve que les circuits courts se montrent résilients, adaptables et innovants. Nous continuerons dans les semaines à venir à poster des informations sur Un Dimanche Aux Aygalades, le Marché Retrouvé et ses producteurs, leur adaptation à la situation actuelle et comment commander auprès d’eux vous aussi.
Questions posées par
Louise Levayer & Océane Zamora
En charge de la mission Alimentation Durable
et de l’Opération Désert Alimentaire
¹ Le Marché Retrouvé s’inscrit dans le rendez-vous mensuel du Dimanche aux Aygalades, évènement organisé par la Cité des arts de la rue, le Bureau des Guides et la Cité de l’agriculture, chaque premier dimanche du mois, sous l’ombrière de la Cité des arts de la rue, à Marseille.
Le marché regroupe une dizaine de productrices et producteurs locaux, sélectionnés selon une charte exigeante (qualité, proximité, respect de la nature et de l’équité sociale). Il s’est implanté au cœur des quartiers nord de Marseille où il existe encore peu d’alternatives à la grande distribution.
Trouvez toutes les informations concernant le Dimanche aux Aygalades par là !
Pour en savoir davantage sur le Mercato Ritrovato, n’hésitez pas à vous rendre sur leur site ou à relire nos précédents articles sur le sujet ici ou là.
* L’illustration de l’article est une photo du Mercato Ritrovato de Bologne, pris à l’automne 2019, lors d’une visite du marché par l’équipe de la Cité de l’agriculture *