Mesurer les services écosystémiques des projets d’agriculture urbaine, une nécessaire difficulté

Le nom vous semblera barbare, il est pourtant essentiel.
Combien de CO2 peut capter une micro-ferme urbaine ? Quels impacts sur les îlots de chaleur urbain ? Et le lien social créé par les jardins partagés alors ?
Les externalités positives des projets d’agriculture urbaine sont nombreuses, encore faut-il en apporter la preuve…

L’agriculture urbaine, à Marseille comme ailleurs, a le vent en poupe ! Sa récurrence dans les programmes des candidat.e.s aux élections municipales, la multiplication des appels à projet qui y sont liés, ou encore les nombreux rapports et avis officiels la concernant, présentent l’agriculture urbaine comme un levier non négligeable pour la résilience des villes de demain.  

L’état de la recherche actuelle laisse entrevoir la multitude d’externalités positives générées par l’agriculture urbaine :

  • Services écologiques (maintien de la biodiversité, réduction des îlots de chaleur urbain, amélioration de la qualité de l’air)
  • Services sociaux (création de lien social, reconnexion des êtres humains à leur alimentation)
  • Services économiques (création d’emplois, relocalisation de la filière agricole et alimentaire)

Ces services que l’on dit « écosystémiques » sont nombreux ! 

Toutefois, il demeure un vrai manque quant à une recherche transversale sur leur évaluation et la mesure de leur ensemble. De même, aucune étude scientifique n’a pour le moment été réalisée sur le territoire marseillais ni même sur la zone méditerranéenne !

Pourtant, la qualification et la quantification précises des impacts écosystémiques des projets d’agriculture urbaine apparaissent comme particulièrement nécessaire. Il s’agit avant tout de convaincre les décideurs et législateurs publics du rôle majeur que peut jouer l’agriculture urbaine dans la transition écologique.
En effet, alors que la seule production agricole urbaine n’est, bien souvent, pas suffisante pour équilibrer les modèles économiques des projets (dans un contexte où l’agriculture rurale est elle-même subventionnée par l’UE alors que l’agriculture urbaine n’est pas spécifiquement intégrée dans les lignes de financement public), les projets d’agriculture urbaine ont encore besoin d’appuis financiers et politiques.
A la Cité de l’agri, nous sommes convaincu.e.s qu’apporter des éléments chiffrés et/ou étayés scientifiquement sur la question de leurs impacts écosystémiques pourrait convaincre, encore mieux, les décideurs politiques, services techniques et financeurs ! L’une de nos ambitions, à plus long terme, est de généraliser la triple comptabilité¹ : étudier les services écosystémiques pour quantifier les impacts et surtout introduire les bénéfices de l’agriculture urbaine dans les bilans économiques et financiers. 

Si nous savons pourquoi nous souhaitons mesurer les impacts de l’agriculture urbaine, encore faut-il savoir comment le faire. Qu’est ce qui est mesurable ? Qu’est ce qui ne l’est pas ? Comment évalue t-on les impacts sociaux d’un projet ? Quels indicateurs utiliser ? Comment isoler les seuls impacts d’un projet d’agriculture urbaine dans un contexte territorial qui se meut en permanence ?
Ce sont quelques-unes des questions qui nous taraudent aujourd’hui.
Pour l’instant, nous lisons, nous nous documentons, nous participons à des ateliers autour de cette question (merci le French Impact !). Et dans nos têtes, il y a comme une petite méthodologie qui commence à se dessiner… 

Le chemin sera sans doute long, mais nous y croyons ! Nous essayons d’ores et déjà de documenter au mieux les différents projets de la Cité de l’agriculture, mais nous approfondissons surtout nos liens avec le monde de la recherche, dans le but d’établir des ponts et de co-construire les connaissances par la recherche-action.

C’est notamment tout l’enjeu du projet de notre future micro-ferme Capricorne (oui, oui on vous en a déjà parlé !) qui vise à mesurer les différentes externalités positives d’une micro-ferme urbaine. L’objectif est de réunir en consortium dès son lancement opérationnel des acteurs scientifiques de différents domaines : INRA, GRAB, Astedhor, AtmoSud, Grec Sud, Faculté d’Eco Gestion (AMU), CEREGE, IRTS et d’autres encore. Mettre tout ce monde autour de la table ne sera pas aisé (langages et intérêts différents, thématique encore peu étudiée), mais qui a dit que nous n’aimions pas les défis ? 

En tous cas c’est promis, nous vous donnerons des nouvelles de ces recherches très bientôt !  

Louis Roland
chargé de la vie associative

¹ Le réseau Fermes d’Avenir a travaillé sur la comptabilité en triple capital.  Au lieu de prendre en compte le seul capital financier, la triple comptabilité valorise aussi le capital humain et le capital naturelCelle-ci permet de quantifier les services écosystèmiques en valeur monétaire, et donc, de les intégrer dans les bilans financiers !
L’étude de Fermes d’Avenir est à retrouver ici 

* L’illustration de l’article provient de notre utopie originelle, mise en images par MOA architecture. Elle fait partie de la construction de l’imaginaire de la Cité de l’agri, que vous pouvez retrouver  *

Sur ces questions de recherche sur les modèles économiques, la Cité de l’agriculture est accompagnée par Marseille Solutions dans le cadre de l’appui aux territoires du Haut commissariat à l’Economie Sociale et Solidaire. Le projet de la Cité de l’agri a en effet été labellisé par le défi French Impact, fin 2019.

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